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Revue de presse


Les traces de l'artiste

Source : Nouvelle République
Date : 2002-02-00

Dans un café de Tours, Rozenn Morizur a peint sa bouche sur les tasses et verres. Et attend les retombées de cette intervention d'un genre particulier.

« Ça m'est arrivé une fois dans un café de tomber sur une trace de rouge à lèvres sur ma tasse » : Rozenn Morizur aurait pu faire « beurk », en prendre ombrage comme tout client ordinaire, et boycotter l'établissement. Mais cette jeune femme, sortie l'an dernier des Beaux-Arts de Tours, a préféré faire de cet incident le point de départ d'un acte artistique pour le moins étrange.

Pas une exposition mais plutôt une intervention, explique Rozenn avec un art consommé de la dialectique. elle a choisi un bar branché du vieux Tours, où elle a ses habitudes, le Café. Elle a peint à la main une empreinte de sa bouche, « telle du rouge à lèvres », sur un lot assez important de verres et de tasses de l'établissement, quotidiennement utilisés par la clientèle du Café.

Derrière la tête, l'artiste avait sa petite idée : « Amener les gens à s'interroger sur les rapports d'intimité qui peuvent exister dans un café. Se trouver confronté à la trace de la bouche de quelqu'un d'autre sur le verre dans lequel on boit, nous rappelle que nous partageons cette vaisselle, que nous buvons tous, à un moment ou à un autre, dans le même verre... Je propose aux clients de poser leur bouche sur ma trace de rouge à lèvres, de boire sur les lèvres de cet inconnu que je suis pour eux. Je pense qu'il y a quelque chose de sensuel là-dedans... »

Le commun des mortels pourra trouver saugrenue une telle démarche artistique. Rozenn Morizur signale en tout cas que depuis le démarrage de l'expérience, dimanche dernier, « il y a eu quelques phénomènes de rejet mais que dans l'ensemble, les gens s'en amusent. ». La jeune femme n'a pas fixé de date limite à son intervention : « Elle durera jusqu'à ce que les verres et les tasses cassent. Les gens peuvent aussi acheter les pièces ou m'inviter à faire la même chose chez eux... » On aura compris que cette artiste qui avoue « mon travail est toujours destructible » a signé là une œuvre tenant plus par le concept et le commentaire que par le résultat esthétique. Mais encore fallaitil en avoir l'idée et la mettre à exécution...

Pierre IMBERT.



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