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Invité(e)s

JOHN LALOR

the democratic paintings series -- extrait

EXPOSITION

du 19/03/06 AU 09/04/06

(du jeudi au dimanche, de 14h à 18h)

au volapük, 12 bis rue Lobin, TOURS



Groupe Laura a invité JOHN LALOR à investir le nouveau lieu dédié à la création contemporaine et aux formes expérimentales artistiques, le VOLAPÜK.
Géré par la compagnie Théâtre a cru, ce lieu est à l'opposé de l'habituel "white cube" de l'art contemporain. L'ancien atelier photographique de Jean-Baptiste Darasse a été totalement repeint en noir et sa considérable hauteur de plafond lui confère un aspect de hangar. Le noir crée cependant une atmosphère confinée, voire intime.
Nous avons désiré relever le défi de présenter un travail de peinture ailleurs que dans un cube blanc.

Depuis 1997-98, JOHN LALOR s'est lancé dans un travail intitulé "the democratic paintings series". On compte à ce jour une douzaine de séries.
Un motif élu par l'artiste - selon un rapport affectif ou en référence à l'histoire de l'art - est répété dans un format quasiment identique d'une série à l'autre (environ 30 x 30 cm) et enfermé dans un caisson en plexiglas.
La répétition et l'alignement drastique des séries tendent à faire disparaître le motif au profit d'un paysage linéaire.

Pour le volapük, JOHN LALOR a présenté :
- "the democratic paintings serie 2 - théorème du triangle équilatéral".
- "the democratic paintings serie 3 - father" (extrait).
- "the democratic paintings serie 7 - citron" (extrait).
- "the democratic paintings serie 9 - social housing" (extrait).
Cette dernière a été présentée sous une forme réalisée spécifiquement pour l'espace du Volapük (entre le bar et les bureaux).




le volapük
Ancien studio photographique, le volapük est un nouveau lieu dédié à la création contemporaine sous toutes ses formes (danse, théâtre, musique, arts plastiques, vidéo...).
Coordonné par le théâtre à cru, il se donne notamment pour objectifs de décloisonner les disciplines artistiques, favoriser les échanges entre artistes et soutenir les projets émergents, en assurant une transmission à tous les publics.
L'exposition de JOHN LALOR donne pour la première fois l'occasion au volapük d'ouvrir ses portes. D'autres suivront...




démonstration de l'échec de la peinture
par FRÉDÉRIC HERBIN

JOHN LALOR aime à le répéter, « la peinture est morte ». Pour autant, il ne finit pas de la mettre en scène. A travers les democratic paintings series, démarrées entre 1997 et 1998, il nous met face à une véritable « autopsie » de la peinture, de son économie, mais surtout de son échec. En répétant, sans qu'il y ait véritablement de fin, la représentation d'un même sujet sur plusieurs années, il donne une incontestable leçon de peinture et met à jour tous les mécanismes qui sous-tendent sa pratique.
Les quatre séries qu'il présente au Volapük, nous montrent d'emblée l'ambiguïté de l'entreprise de JOHN LALOR. La série n° 3, intitulée father, nous révèle en effet le caractère obsédant des images et la manière dont celles-ci se chargent d'éléments affectifs, puisque c'est ici le portrait du père de l'artiste qui est multiplié. Il en va de même avec les séries n° 7 et n° 9, respectivement nommées citron et social housing, qui nous donnent à voir un motif extrait d'un tableau de Manet (Musée d'Orsay) cher à l'artiste, et la maison qu'habitent les parents de sa compagne.
Cependant, l'aspect affectif et sentimental qui accompagne ces images est rapidement mis à mal par le système sériel sur lequel se fonde le travail de JOHN LALOR. Partant d'un modèle, souvent une image mécanique telle que la photographie, l'artiste reproduit inlassablement le même motif sur la toile. Dans cette démarche, si en effet le sujet figuré laisse apparaître le caractère obnubilant qu'il revêt pour l'artiste, il tend aussi à se dissoudre dans sa répétition et sa mise en scène.
Exposer plusieurs dizaines de fois le même objet représenté amène obligatoirement, dans un premier temps, le spectateur à se poser la question de l'unicité de l'œuvre et de la production en série d'une image. La façon dont l'artiste accroche ses toiles joue également de cette impression. La série father est toujours présentée comme un bandeau sur le mur, chaque cadre venant presque se coller au précédent. De la sorte, le spectateur n'est jamais face à une seule image, mais toujours confronté à deux ou trois représentation du même sujet. Avec la série n° 2, intitulée théorème du triangle équilatéral, Lalor va beaucoup plus loin puisque cette fois les toiles sont présentées par groupes de trois, au sein desquels l'une est basculée à 90° et une autre à 180°. Finalement, avec cette série on en vient à se demander si le sujet peint présente la moindre importance pour JOHN LALOR, le titre faisant même oublier ici qu'il s'agit à l'origine d'un motif de slip extrait d'une photographie collectée sur internet par l'artiste Thomas Ruff. Au Volapük, cette collusion entre l'indifférenciation des œuvres et leur présentation entre dans une nouvelle dimension. Exposée pour la première fois, la série social housing fait l'objet d'une mise en espace particulière grâce à l'introduction de socles/piliers sur les faces desquels les toiles sont accrochées. Le spectateur se retrouve donc physiquement au centre du dispositif, comme plongé dans une forêt d'images, cerné par la reproduction apparemment toujours identique de la même représentation.
En fait, il faut faire l'effort de s'approcher de chaque tableau et de le comparer avec ceux qui l'entourent pour comprendre quels sont les véritables enjeux du travail de JOHN LALOR. Il faut prendre le temps de vérifier que si chaque toile semble être recouverte du même motif ce n'est en réalité jamais le cas, et que ce que donne à voir JOHN LALOR est une véritable démonstration de l'échec de la peinture. Une peinture qui se montre incapable d'atteindre l'essence d'un sujet. Ainsi, la pratique de JOHN LALOR, malgré le fait qu'elle se fonde sur la répétition d'un même motif, s'avère inapte à épuiser un sujet. La mise en place de gestes presque mécaniques et la connaissance parfaite d'un objet, qui caractérisent la réalisation de séries s'étalant sur plusieurs années ne suffisent pas à supprimer cette distance indépassable qui sépare un peintre de son sujet.
Finalement, derrière cette apparente répétition monotone, c'est toujours l'artiste que l'on perçoit. En conséquence, si le travail de JOHN LALOR peut apparaître désincarné, on ne doit pas oublier qu'il n'hésite pas non plus à réintroduire l'humain dans son travail en demandant, pendant chacune de ses expositions, à un de ses pairs d'élire une toile dans les séries father et théorème du triangle équilatéral pour qu'elle soit agrandie, ou au curator d'intervenir dans le choix de la teinte de jaune qui sert de fond à la série citron. Aussi, après Daniel Buren à la Glassbox en 2003, cette fois c'est Édouard Levé qui va distinguer une toile à l'intérieur de ces séries : encore une façon de jouer avec le caractère unique et artistique de chaque tableau, malgré le système sériel auquel il appartient, grâce à la validation d'un second artiste.


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