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Zombie Today


ZOMBIE TODAY

Au départ, des images rencontrées. Sur toutes sortes de supports, sans distinction aucune. De la publicité aux photos de vacances en passant par les logos, ou les pochettes de disques, la télévision et les journaux. Tout le spectre de l’image contemporaine en somme. Equivalence.

Toutes sortes d’images, mais des images qui retiennent l’attention du peintre, pour quelque raison. Retenues dans leur intégralité, ou pour un détail. Un fragment ou une ambiance, une idée. Des images qui font, pour le peintre, image. Elles sont stockées : photographies découpées, photocopiées, croquis, textes, notes… De l’image physique à son évocation. Comme une banque de données. A disposition. Comme des matériaux. Des samples. Elles servent de bases, de supports pour construire des tableaux. Pour inventer, mixer. Coller, assembler, combiner, machiner, agencer.

Car, jamais, il n’est simplement question de copier ces images. Modèles, elles ne sont aucunement reproduites. L’image est proprement refaite. C’est-à-dire faite de nouveau, réitérée, et faite tout autrement, transformée ; mais aussi remise en état et peut-être encore dupée, roulée, abusée, trompée.

Regine Kolle travaille en dehors de toute idée de style. Des manières de peindre, des manières de faire, différentes, se télescopent. Avec ruptures et sautes brusques. Le peintre surfe de l’une à l’autre. Abstraction, Bad Painting, expressionnisme, graffitis, mangas, bandes dessinées, albums de coloriages… Sans qu’il ne soit jamais question de pasticher. Mais tout au contraire de refaire, encore. S’approprier.

Chaque fois, la manière change et semble s’adapter à l’image. A son contenu iconographique, son énergie… De l’adéquation à l’opposition, à chaque tableau s’invente un nouveau rapport, un lien inédit. Les toiles affirment toutes une identité particulière et prennent leur place dans le réseau, le circuit que constitue l’ensemble. Toujours titrés, ces tableaux sont comme autant d’amorces d’histoires. Fortement narratifs, ils se constituent au confluent de multiples univers. La musique, le cinéma, la télévision, l’art, la publicité, le quotidien…

C’est une peinture de la circulation. En constant déplacement. C’est une peinture qui déroute, déstabilise. Car, toujours sur le fil. Au bord. A la limite.

C’est une peinture qui prend en compte une dimension essentielle de notre contemporanéité. Elle assume et joue pleinement du constant mélange d’informations de toutes natures, sans hiérarchie aucune, qui constitue notre aujourd’hui. La surcharge, la diversité, la juxtaposition de bonheurs et de médiocrités, d’horreurs et de niaiseries… Nous sommes cernés, saturés, constamment sollicités. C’est cette réalité de fait que travaille le peintre. Acerbe et critique, mais, dans un même temps, il ne s’agit pourtant pas de nier le monde, de le fuir naïvement, de le rejeter. Mais bien au contraire, de s’y inscrire, et d’en travailler les signes avec singularité.

Frank Lamy

Verso n°18, avril 2000



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