Micucci xx
Les sœurs Micucci sont jumelles. Nées en 1975, elles ont fait toutes les deux leurs études aux beaux-arts de Cherbourg, puis Anne-Emmanuelle a continué son cursus à Bourges et Virginie au havre. Depuis plusieurs années, elles organisent, construisent, élaborent des univers qui leur ressemblent.
Au travers d’une complicité gémellaires, elles mettent en scène un monde chaotique (Finis ton petit pois pour sortir de la tondeuse, ou bien, Une femme, du vin et pas de vaisselle) et érotique (Suce-moi le gant en attendant que, ou encore Défonce-moi le trou). Les jeux de mots qui grouillent dans chacune de leurs installations relèvent du Surréalisme. Les mots inventés sont ceux d’un enfant qui ferait allusion au réel, mais qui, vu au travers de ses yeux, prendrait une forme fantasmée et caricaturale.
Receleuses d’objets obsolètes, elles convoquent le souvenir d’un monde consommé. Le recyclage consiste non pas à donner vie à ces objets, sinon à les placer dans un autre contexte et ainsi mettre en scène leur désuétude. Les installations des Mucucci XX investissent les lieux d’exposition dans un esprit d’art total : volumes, dessins, vidéos, diapositives, écritures, sons, publications (…), le tout cloîtré (palissade, papier peint, rideau…) afin de cerner la scène et rendre compte de la solitude, ce « cycle des satisfactions immédiates pour ceux qui n’en demandent pas beaucoup » (A-E et V Micucci).
IL s’agit bien là de dénoncer l’ennui que l’on essaie de combler par la multitude d’objets de consommation, une société de plus en plus individualiste qui tend à se débarrasser de l’espace public par un remplissage de l’espace domestique, tous ces signifiants exotiques qui pénètrent le lieu de l’intime afin de nous divertir et tuer l’ennui.
On dit tuer l’ennui, mais c’est faux. C’est comme tirer sur un vampire. Au bout d’un moment le revoilà frais comme un gardon, prêt à te sauter au cou. Pour tuer l’ennui, il faut lui enfoncer un pieu dans le cœur.
Ce qui explique que personne ne tue jamais l’ennui. On distrait l’ennui. On trompe l’ennui. Mais le découragement revient. (…).
On sort de chez soi pour tuer l’ennui à ce qu’on dit. (…). Je me demande pourquoi l’ennui est toujours en rapport avec la maison et l’entourage familial. Tout le monde est plein de volupté, mais jamais à la maison, toujours chez les autres. J’en déduis que la maison est un lieu mal fait. Physiquement, la maison est un lieu mal fait.
La propriété privée est une idée qui a dégradé l’être humain parce qu’il a toujours laissé la part la plus ludique de son existence s’exprimer à l’extérieur.
Propriété prive : stupide terrier où accumuler de la nourriture et des heures de sommeil.
Rodrigo Garcia, Je crois que vous m’avez mal compris, in « Fallait rester chez vous, têtes de nœuds », Les Solitaires Intempestifs, Besançon, 2002, p.58-59.
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